En parcourant les collections numérisées des bibliothèques spécialisées de la ville de Paris je suis tombée sur le livre d’or du Chat Noir. Un petit trésor de dessins et de poésie avec les dédicaces des artistes qui fréquentaient le cabaret .

Le cabaret du Chat noir

Le Chat Noir , même si on le connait aujourd’hui sous la forme d’une revue artistique (sur Gallica) était, avant tout un célèbre cabaret à Montmartre devenu le bastion des artistes de la fin du 19ème .

Rodolphe Salis, le propriétaire des lieux a réussi à rassembler dans son établissement peintres, poètes et chansonniers de l’époque comme Aristide Bruand, Pissaro, Van Gogh , Alphonse Allais ou Steinlen… lire les articles de Paris Zig-Zag  ou de Chatsnoirs sur le sujet.

Dédicaces d'artistes

Sur une des première page du livre d’or on peut voir un dessin de E. Waucquier  fait à la plume  et qui illustre un poème de Paul Arène.
Hoc erat in votis
Je voudrais habiter, ermite en plein Paris,
Dans le quartier bourgeois et neuf qui les enferme,
Cette vieille maison avec des airs de ferme
Et ce petit jardin qui fut un champ jadis.
Le bon endroit pour vivre heureux et piocher ferme
Les journaux, trop bavards, y seraient interdits
Et le seul espalier payant l’argent du terme
J’aurais pour moins que rien cet humble Paradis.
La chambrette joyeuse et claire, et qu domine
Le jardin, sentirait en Mai la balsamine,
Aux mois chauds, une odeurs de grappe et de fruit mûr;
Et l’hiver, quand le ciel rit par un coin d’azur,
A travers es rideaux qu’un rayon illumine
Des ombres de moineaux passeraient sur mon mur.
Paul Arène
Rodolphe Salis au fusain
Portrait de Jean Lorrain à l'encre
Souvenirs et Regrets de Salis
Ici  c’est un joli de dessin de Steinlen qui illustre le poème de Gustave Montoya
Charme!
 
 
Ta façon de draper ta jupe m’ensorcelle,
C’est par elle que tu m’as pris et sache bien
Que c’est elle plus qu’autre chose qui me tient
Et que je t’aime grandement pour l’amour d’elle. 
Mon œil se prend dans les filets de ta dentelle
Puis y demeure longuement et s’entretient
de ton mollet , de toi, de moi, même de rien
Tant il aime ce lieu coquet qui le harcèle
et je voudrais te posséder, toi non pucelle
Dans la rue au moment où ton joli doigt tient
Les plis ourlés et dentelés car tu sais bien
ta façon de draper ta jupe m’ensorcelle.
Gustave Montoya
Si tous ces vers sont un peu grivois, ils dénotaient surtout une certaine liberté artistique et le côté bohème propre à la Belle époque.
Ci-dessous le poème de Clément Privé avec un dessin au crayon et à l’encre représentant l’intérieur des cuisine du cabaret.
A la cuisine,
Elle avait beaucoup plus de moustaches au bec
Que moi. Je ne savais pas encor’ la manière
D’aimer, bien qu’amoureux de notre cuisinière
Luronne de trente ans et quelque chose avec.
Moi quinze. Son corset craquait sous les poussées
De ses seins vigoureux? Sa joue avait des tons
De groseille trop mûre, et, de ses deux mentons
L’aspect faisait rêver des choses insensées.
Or, un jour que Margot, déesse des torchons,
Dans un bocal de grès mettait des cornichons
Confire, tout à coup, voilà que je m’embrase
Et je la baise au cou, radieux et tremblant
-As-tu fini, crapaud! fit-elle en reniflant.
Je m’en allai, le cœur plein d’une douce extase.
Clement Privé

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Auriol : graphiste et typographe - DESSIN OU PEINTURE · 7 mars 2019 à 7 h 00 min

[…] place dans la vie montmartroise des années 1880-1900. Il était même secrétaire de rédaction du Chat noir.  C’est son travail de graphiste et de typo que je vous présente […]

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